(Québec) Les villes de Québec et
de Winnipeg représentent des marchés «limites» pour la Ligue nationale
de hockey (LNH) si elle devait y loger une franchise, selon une analyse
du Conference Board du Canada. Reste maintenant à savoir si les deux
versent du côté rentable ou pas de cette fameuse «limite».Le
7 avril, l'institut sautera dans la mêlée du retour d'une équipe
professionnelle dans les deux villes en publiant une étude détaillée sur
les chances de succès de chacune et, par la bande, expliquera les
raisons du départ des Nordiques et des Jets.«On ne veut pas que les Nordiques reviennent pour cinq ans seulement»,
explique Mario Lefebvre, directeur du Centre des études municipales.Lundi, le Conference Board a dévoilé une partie de son étude en publiant
sa grille d'analyse, énumérant les quatre «conditions gagnantes pour le
marché», soit la taille de la population, les revenus par habitant, la
place du privé dans la région et les conditions économiques.Pour les quatre conditions, Québec et Winnipeg flirtent avec les limites
de l'acceptable. Les deux villes sont ainsi légèrement en deçà du seuil
de 800 000 habitants établi par le Conference Board pour atteindre la
rentabilité.Pour arriver à ce chiffre, l'institut utilise une formule simple : elle
multiplie le nombre de billets par match par le nombre de joutes jouées à
domicile. Pour le LNH, une ville doit compter sur 800 000 personnes.
Pour la Ligue canadienne de football (LCF), 250 000. Pour le baseball,
2,5 millions.PopulationQuébec et Winnipeg comptent ainsi un bassin de 750 000 personnes. Le
Conference Board n'a pas retenu l'évaluation de 9,1 millions qu'avait
utilisée Ernst & Young dans son évaluation d'août dernier sur la
rentabilité d'un amphithéâtre dans la capitale québécoise, ce qui
rassemblait toute la population de l'est de la province, des provinces
maritimes et des États américains limitrophes.«On reconnaît qu'il est tout à fait possible que des gens de
Rivière-du-Loup ou Saguenay viennent, mais il faut se rappeler que le
hockey, c'est l'hiver. Les conditions de route sont moins faciles. Si
c'était estival, oui, on pourrait compter sur l'appui de gens assez
loin, mais l'hiver, ce n'est pas évident de traverser le parc. Je ne dis
pas que ça ne se fera pas, Québec en aura besoin même, mais on ne peut
pas les compter», tranche Mario Lefebvre.Pour compliquer l'équation, le Conference Board tiendra compte du
vieillissement de la population, qui touche particulièrement Québec.
«C'est clair que les 65 ans et plus vont moins souvent au hockey»,
indique M. Lefebvre.À Winnipeg, il faut toutefois entrer dans l'équation la présence d'une
équipe de football, les Blue Bombers. Avec deux équipes
professionnelles, la Ville risque la saturation, les gens n'ayant pas
des ressources illimitées pour assister aux matchs des deux équipes,
même si elles jouent à différentes périodes de l'année. «Une famille qui
met 300 $ pour aller voir une partie de hockey n'en aura pas autant
pour aller voir du football après», poursuit Mario Lefebvre.Point positif pour les deux villes en quête du retour de la LNH : les
revenus par habitant ont nettement progressé depuis le départ de leur
équipe. De 60 % dans les deux cas. Ils atteignent désormais 30 134 $ à Winnipeg et 28 159 $ à Québec. À Montréal, le revenu par
habitant est plus faible, à 26 729 $, mais la taille du marché
montréalais (3,6 millions) vient compenser l'écart.Point plus difficile, le Conference Board constate la faible présence de
sièges sociaux dans les deux villes, particulièrement à Québec. Or, les
entreprises ont surtout tendance à investir là où elles sont établies.Sur les 800 plus grandes entreprises au Canada, Winnipeg compte 30
sièges sociaux, contre 17 pour Québec. Ces chiffres sont très loin de
ceux de Toronto (286), Calgary (119), Montréal (98) et Vancouver (79).
Reste que les régions d'Edmonton et d'Ottawa, où évoluent les Oilers et
les Sénateurs, en comptent respectivement 26 et 19.Enfin, le Conference Board analysera les conditions économiques dans
lesquelles pourraient évoluer les équipes. Ce point désavantage Québec
par rapport à Winnipeg puisque l'impôt est plus élevé au Québec qu'au
Manitoba.